L'immigration européenne en Algérie |
E. Boileau - G. Gomez
La France ne sait que faire de cette conquête imprévue. C'est dire qu'elle n'essaie pas d'intéresser ses ressortissants; elle les freine jusqu'en 1835. Arrivent d'abord des aristocrates fuyant la révolution de 1830 (les gants jaunes). Leurs concessions seront peu à peu affermées à des Espagnols.
Viennent aussi tous les Méditerranéens : Espagnols et Mahonnais (ile de Minorque), Italiens du Piémont et de Sicile, des Maltais. Mais également des Suisses et des Allemands.
Lamoricière, et Bugeaud après 1840, s'inquiètent de cette absence de projet; ils créent des villages de soldats démobilisés et mariés à des Espagnoles ou des Provençales, mais souvent aussi par regroupement de nationalités: Dély-Ibrahim rassemble des Allemands, Berbessa est un groupement suisse plus tardif.
La fermeture des Ateliers nationaux en 1848 amène une population ouvrière pas du tout préparée. La mortalité est effrayante: 25% dans la Mitidja ! Beaucoup repartent. Les Mahonnais rachètent leurs concessions.
Suivent les " transportés ", après le sénatus-consulte de 1852, qui sont installés surtout dans l'Est et seront bientôt libérés. De 1848 à 1852, sur 20.000 arrivants, 10.000 restent, 3.000 meurent et 7.000 repartent, propageant une opinion défavorable.
Napoléon III est plus favorable à l'installation de sociétés, telle la Compagnie Genevoise, auxquelles il accorde de vastes concessions en échange de grands travaux : barrages, routes.
En 1870,la IIIème république institue une politique de colonisation officielle et fait appel aux Alsaciens-Lorrains.
Les Alsaciens-Lorrains, (comme les Allemands) partaient traditionnellement plutôt vers l'Amérique par Le Havre; la propagande les en détourne. En 1871, avant même la signature du traité de paix, ils sont réclamés par la Société d'Agriculture d'Algérie. On ouvre deux centres de recrutement: Nancy et Belfort. On débloque 100.000 hectares sur les confiscations en Kabylie: 5.000 arrivants entre 1871 et 1875.
En 1880-81, le phylloxéra amène la dernière vague: les gens du Midi ruinés, d'autant que les banques offrent des prêts pour planter de la vigne sur une plus grande échelle.
D'après A. Lardiller (Le peuplement de l'Algérie
Ed. L'Atlanthrope 1992)
Répartition de la population européenne par nationalité
Population européenne par nationalité en Algérie |
|||||
Nationalités |
1841 |
1851 |
1872 |
1881 |
1896 |
Français |
16.677 |
66.050 |
129.601 * |
195.418 * |
346.870 * |
Espagnols |
9.748 |
41.558 |
71.365 |
114.320 |
157.560 |
Italiens |
3.258 |
7.555 |
18.331 |
33.693 |
35.539 |
Allemands |
? |
6319 |
? |
4.201 |
|
Maltais |
|
|
|
|
12.815 |
Total Européens |
37.394 |
131.283 |
environ 245.000 |
376.000 |
559.303 |
* y compris les juifs (naturalisés par le décret Crémieux de 1870) et les Néo-Français (sénatus-consulte de 1865 permettant la naturalisation sur leur demande des Européens résidant en Algérie depuis au moins 3 ans, des Musulmans et des Juifs, et Loi de 1889 naturalisant automatiquement les Européens nés en Algérie)
Naturalisés entre 1866 et 1899 (Néo-Français) |
|
Nationalités |
Total |
Allemands |
6.490 |
Anglo-Maltais |
1.314 |
Espagnols |
4.880 |
Italiens |
7.949 |
Musulmans |
1.332 |
Suisses |
1.058 |
Autres |
4.850 |
Total |
27.873 |
D'après G. Crespo et J.J. Jordi (Les Espagnols dans l'Algérois Ed. L'Atlanthrope 1991)
Evolution de la population en Algérie